Que vous vient-il à l’esprit quand vous entendez « sciences fondamentales »? Laboratoire, sarraus blancs, analyses fastidieuses sur des échantillons cellulaires infinitésimaux? Or, dans le cas de Courtney Bell, la recherche en sciences fondamentales l’a fermement ancrée dans la communauté, là où elle se sent à sa place.
Récipiendaire d’une bourse de maîtrise en sciences de l’ACRV/Gilead pour la recherche sur le VIH, Courtney poursuit ses études de maîtrise à l’Université du Manitoba et a souhaité découvrir pourquoi le VIH semble être plus répandu et progresser plus rapidement dans la population autochtone du Manitoba. Elle-même Métisse, Courtney a choisi d’étudier une population réunissant des utilisateurs de solvants, puisque selon son hypothèse, ces substances sont associées à des facteurs biologiques et sociaux qui accroissent le risque de VIH et de progression rapide de la maladie. Le problème était que l’utilisation des solvants était un domaine peu étudié dans le contexte du VIH et que les études effectuées jusque là n’en avaient pas mesuré pas l’impact sur le système immunitaire.
C’était l’un des problèmes. L’autre était qu’il fallait trouver une cohorte de toxicomanes pour participer à sa recherche. C’est là où entre en jeu la dimension communautaire de ses travaux.
« Comment réunir une communauté qui n’en forme pas une réellement? », se demandait Courtney.
Elle a trouvé réponse à sa question à l’organisme Sunshine House, un centre communautaire pour les sans-abris, marginalisés et toxicomanes de Winnipeg. C’est là qu’elle est entrée en contact avec la communauté, elle y a passé du temps, elle y a pris des repas et a recruté des toxicomanes pour qu’ils deviennent partenaires de sa recherche, qu’ils y participent et lui fassent des commentaires. Après plusieurs repas et discussions avec eux, Courtney a voulu savoir comment mieux structurer sa recherche et comment utiliser les résultats de manière à ce qu’ils aident la communauté. Elle a ainsi peu à peu fait accepter son projet.
« Mon approche s’est faite en douceur », affirme Courtney. « Autour de la table, on pouvait sentir la gêne et la nervosité. Mais les gens se sont montrés pleins de bonne volonté et désireux de participer. »
Maintenant, avec l’accord des participants, Courtney prévoit obtenir et analyser des échantillons sanguins pour vérifier si l’utilisation de solvants accroît l’activation immunitaire par suite d’une atteinte des parois muqueuses des voies respiratoires supérieures et des voies digestives.
Le superviseur de Courtney, le Dr Keith Fowke, est impressionné par son degré d’engagement à l’endroit de la communauté et par la façon dont cet engagement enrichit la dimension scientifique de sa recherche.
« Elle est réellement empathique, elle se soucie sincèrement des gens », ajoute-t-il. « Elle a tout ce qu’il faut. Sur le plan scientifique, elle se débrouille très bien et elle fait un pas de plus comme chercheur pour se rapprocher des gens. »
Quant à Courtney, elle est reconnaissante de l’aide reçue de l’ACRV, des Instituts de recherche en santé du Canada, ainsi que des Network Environments for Aboriginal Health Research et de leur programme de bourses universitaires hors les murs. Mais Courtney, qui fait partie du conseil d’administration de Sunshine House et participe à la rédaction des demandes de subventions, a un peu changé d’orientation après avoir travaillé auprès des toxicomanes. Si à l’origine elle souhaitait faire carrière en recherche, elle a plutôt décidé à présent d’entreprendre des études de médecine.
« J’ai vraiment adoré la recherche, mais le fait d’avoir travaillé auprès de la communauté m’a fait découvrir un nouvel aspect de moi-même », ajoute-t-elle. « J’ai apprécié travailler avec ces gens et connaître leur vie. »