
Tandis que la Dre Charu Kaushic (PhD) menait des recherches sur la façon dont les hormones sexuelles féminines et le cycle menstruel régulent le système immunitaire, au cours de ses recherches postdoctorales, une question ne cessait de lui revenir : « J’examinais le système immunitaire dans des conditions normales, » explique-t-elle. « Par contre, je me demandais sans cesse ‘ que se produirait-il s’il y avait infection? ’ » Même si le laboratoire n’œuvrait pas dans ce secteur d’étude à l’époque, cette question allait déterminer l’avenir de sa carrière de chercheure – étudier les rapports entre l’infection virale, les hormones et le système immunitaire muqueux des voies génitales féminines.
Les femmes, et particulièrement les jeunes femmes, sont présentes de façon disproportionnée dans les nouvelles infections au VIH dans nombre de pays d’Afrique méridionale. Le laboratoire de la Dre Kaushic à l’Université McMaster était l’un des premiers à préconiser la recherche sur la transmission muqueuse du VIH afin de jeter de la lumière sur la façon dont il serait possible de stopper la transmission par relations hétérosexuelles. Comme elle l’explique, c’est une des grandes lacunes de la documentation. « Pendant la 20 premières années de l’épidémie, les chercheurs se penchaient sur l’aspect le plus facile à étudier, c’est-à-dire le VIH dans le sang. Ces études avaient leur importance pour la mise au point de thérapies antivirales, mais elles ne nous ont pas aidés à comprendre comment le virus se transmettait par les voies sexuelles. »
La muqueuse du canal reproducteur se compose d’une couche de cellules épithéliales. Ces cellules sont les premières à interagir avec le virus et pourtant, elles ne contractent pas l’infection. Le laboratoire de la Dre Kaushic a été le premier à faire ressortir que les cellules épithéliales du canal reproducteur réagissent au VIH en activant des signaux de danger et en fabriquant des médiateurs inflammatoires. Même si c’est là une réponse appropriée à l’infection, l’inflammation elle-même pose problème lorsqu’il s’agit de l’exposition au VIH. « Les cellules épithéliales de la muqueuse s’écartent légèrement les unes des autres en raison de l’inflammation locale et le virus en tire parti en traversant la barrière épithéliale, obtenant ainsi accès à l’intérieur du corps, » de dire la Dre Kaushic. Le virus pénètre non seulement à travers la couche protectrice, mais tire avantage de la réaction inflammatoire mise en branle par les cellules épithéliales – soit de nombreuses cellules cibles à infecter.
Au carrefour des travaux de la Dre Kaushic : une récente subvention d’équipe obtenue des IRSC dans le domaine de l’immunologie muqueuse et s’intéressant aux interactions entre les hormones, le microbiome vaginal et l’inflammation. « La dernière pièce du casse-tête est le microbiome vaginal, qui est régulé par les hormones. Par la suite, le type de bactéries qui s’y trouve détermine s’il y a inflammation ou si l’environnement est sain, » d’expliquer la Dre Kaushic. La subvention d’équipe, l’une des trois octroyées dans le cadre d’un concours pancanadien organisé par les IRSC et la Fondation Bill et Melinda Gates, a commencé en 2015 et se poursuivra pendant trois ans.
Même si elle mène ses recherches à l’échelle cellulaire, la Dre Kaushic est consciente de l’influence que celles-ci peuvent avoir sur les décisions que prennent quotidiennement les femmes en ce qui concerne leur santé sexuelle. Au début de sa carrière, après un événement du Réseau ontarien de traitement du VIH/sida (ROTV), des fournisseurs de soins de santé de l’auditoire sont allés la voir pour lui demander des conseils sur ce qu’ils devraient dire à leurs patientes. » J’étais abasourdie comme de nombreux autres scientifiques, car jusque-là, mon parcours était strictement universitaire. » Maintenant, l’approche communautaire, la consultation et la sensibilisation font partie intégrante de ses travaux de recherche. « Je crois que mes travaux ont des répercussions importantes que les femmes doivent connaître. La gestion d’un laboratoire de recherche a des hauts et des bas. Ce qui me stimule toujours, c’est de mettre les femmes en mesure de prendre des décisions éclairées en matière de santé sexuelle. »
L’Association canadienne de recherche sur le VIH/sida (ACRV), l’initiative de recherche VIH/sida des IRSC, la Fondation canadienne de recherche sur le sida (CANFAR), le Réseau canadien pour les essais VIH (RCE) et le Bureau de coordination de l’alliance (BCA) de recherche et de développement de l’Initiative canadienne de vaccins contre le VIH (ISCVV), souhaitent adresser leurs remerciements à la Dre Kaushic pour sa contribution importante à notre compréhension du VIH. Son travail s’inscrit dans un vaste effort de recherche canadien qui améliore la vie des personnes touchées par le VIH au Canada et ailleurs dans le monde.